Comment l’administration communautaire procède-t-elle à l’identification des siens ? Avertissez-moi par e-mail des nouveaux articles. (…) Ces mécréants (, c'est-à-dire ici renvoyant à sa provenance géographique, à savoir les terres centrales de l’Em, Cet extrait, bien que ne nommant pas expressément les Arméniens, fait pourtant penser très précisément à certains d’entre eux, comme Yéghiazar, du Trésor personnel de Muhammad ‘Alî-, possède, comme on le découvre dans son testament rédigé en 1827, une maison en ville, dans le quartier franc, et une autre dans le quartier du Vieux-Caire, avec jardin, à proximité du Nil, ainsi que des esclaves abyssiniennes, blanche (plus précisément « géorgienne d’Arménie »), . Les remarques mentionnant explicitement les Arméniens apparaissent entre 1812 et 1821, date finale de la chronique. La première appellation renvoie généralement à un contexte où le registre de langue est plus soutenu, tandis que la seconde se rencontre dans les documents plus courants comme les registres de baptême, mariage et sépulture avant 1864. Certains prénoms, plus courants que d’autres (par exemple Hagop, Garabed, Boghos, Bedros), appellent impérativement un complément d’information pour que l’on ne confonde pas les individus les uns avec les autres. Elles révèlent un souci, dès le début du XIX. Les Arméniens ont été en contact relativement tôt avec les égyptiens, probablement dès la période romaine et pour sur chrétienne. 25Pourtant, les Arméniens vivent, au début du xixe siècle, en deux groupes distincts, Arméniens apostoliques et Arméniens catholiques. Le prélat des Arméniens d’Égypte se désignait simplement comme « l’évêque Guiragos, prélat des Arméniens d’Égypte » (yékibdosi hayots aratchnort Guiragos yébiskopos). Et l’on constate, malgré l’absence de procédure uniforme et fixe d’identification pour les individus, malgré l’absence d’un cadre rigoureux, une forme de régularité. Les premiers actes que l’on a retrouvés, réguliers et soigneusement tenus, de baptême, mariage et sépulture des Arméniens apostoliques, datent de 1826. De même, Krikor agha est tantôt appelé Bilezigdji oghlou (en 1826, 1827, 1829, 1831), tantôt Bilezigdjian (en 1830). L'Imam Mohamed Refat, dit que les arméniens tiennent une place particulière en Egypte par leur militantisme, et ce depuis longtemps. Cela n’empêche pas des Arméniens catholiques de donner un parrain arménien apostolique à leur enfant, ce qui ne semble pas poser problème à l’Eglise, ni même d’avoir recours à un témoin de mariage arménien apostolique. Les femmes semblent plutôt se marier dans la communauté de leur mari. 15Cet extrait, bien que ne nommant pas expressément les Arméniens, fait pourtant penser très précisément à certains d’entre eux, comme Yéghiazar amira : il occupe une haute position -il est ṣarrâf du Trésor personnel de Muhammad ‘Alî-, possède, comme on le découvre dans son testament rédigé en 1827, une maison en ville, dans le quartier franc, et une autre dans le quartier du Vieux-Caire, avec jardin, à proximité du Nil, ainsi que des esclaves abyssiniennes, blanche (plus précisément « géorgienne d’Arménie »)9. Jabartî ʿAbd Al-Raḥmân al-, 1997, ‘Ajâ-îb al-âthâr fî al-tarâjim wa-l-akhbâr, nouvelle édition préparée par ʿAbd al-ʿAzîz Gamâl al-dîn, Madbûlî, Le Caire, 5 volumes. On estime aujourd’hui les Arméniens à peine à 5000 individus. Il entérine à la fois la démocratisation des institutions arméniennes de l’empire et leur sécularisation. Les individus sont appréhendés dans les nouveaux registres selon dix rubriques, identiques pour tous les membres du groupe, hommes, femmes et enfants, chacune formant une colonne séparée des autres par une ligne tracée sur la page. Au nom de Dieu tout puissant, je soussigné Grégoire d’Elie connu chez les indigènes sous le nom de Karkour Eghia et chez les Arméniens de Krikor Yeghiayan … ». C’est très exactement de l’année 1864 que l’on peut dater le début de l’élaboration d’un état civil moderne dans la communauté arménienne d’Égypte, du moins chez les Arméniens apostoliques qui constituent alors la majeure partie des Arméniens. Jabartî, 1997. Le quatrième concerne l’administration nationale des Provinces. Il arrive même que l’on ne connaisse pas son nom alors que l’on connaît son origine géographique, ce qui montre l’importance que les individus accordent, en période d’immigration, à l’origine géographique. Or ils n’ont pas d’autre souci ni d’autre étude que de trouver les moyens d’augmenter la faveur dont ils jouissent auprès de leur maître, d’approuver ses desseins, de louer ses inventions » (. sont victimes de la meilleure formation de leur clergé : leur enregistrement est minutieux dès le début du siècle et ne change guère. Comment enregistrait-on les individus, comment les identifiait-on en l’absence d’un cadre aussi rigoureux que celui qui s’impose en 1864 ? nterview du Dr. Vicken Jizmejian et du Dr. Geroge Noubar Simonian. De même, en 1864, on apprend que « Monsieur Simeon, originaire de Tokat, qui est Emin Kiachif, est mort à l’âge d’environ 90 ans ». Leurs archives, conservées au Patriarcat catholique du Caire, ne sont plus accessibles depuis plusieurs années. Les Arméniens catholiques, qui s’appellent de manière officielle sur leurs registres, au cours du, , nomment les Arméniens apostoliques Arméniens d’Etchmiadzine (, , en 1865). Pourtant, les Arméniens vivent, au début du, siècle, en deux groupes distincts, Arméniens apostoliques et Arméniens catholiques. Que leur identité arménienne est très importante tout en étant à 100% égyptien. Il est vrai que les hommes adultes exercent quasiment tous une profession. Il ne se transmet pas. siècle, et, de ce fait même, l’élite dirigeante des Arméniens. Très peu d’individus en sont privés. 40Le métier est très fréquemment indiqué. Dans tous les cas, dès 1864, la terminaison en -ian rend visible l’appartenance à la communauté. 2 Leurs archives, conservées au Patriarcat catholique du Caire, ne sont plus accessibles depuis plusieurs années. La première appellation renvoie généralement à un contexte où le registre de langue est plus soutenu, tandis que la seconde se rencontre dans les documents plus courants comme les registres de baptême, mariage et sépulture avant 1864. Certaines années sont moins bien rédigées que d’autres, les énoncés de longueur variable. Les registres des baptêmes, mariages et décès des Arméniens d’Alexandrie sont toutefois demeurés à Alexandrie. Dans le texte, ces éminents personnages disent qu'ils sont la 3ème génération des Arméniens d'Egypte. Lorsque le plus grand notable arménien du début du xixe siècle, Yéghiazar amira, rédige son testament, en 1827, le prélat des Arméniens d’Égypte confirme, sur le document, l’identité du testateur ainsi que la véracité de son acte. On trouve surtout des Coptes, des Grecques (i khepti azké, i hoyn azké) car les étrangers sont, de fait, presque toujours des étrangères. Il n’est pas le seul. Certains sont qualifiés de pauvres (aghkad), tel Hovhannès originaire de Van (vantsi aghkad Hovhannès), qui meurt en octobre 1827, voire même d’assistés (denangtsial) quand ils sont aidés financièrement par la communauté. On remarque cependant, malgré la rareté des informations les concernant, qu’elles effectuent également le pèlerinage à Jérusalem, qu’elles portent des titres honorifiques spécifiques comme ceux de khatoun ou doudou, souvent en lien avec la situation sociale de leur père ou époux. Toutefois, il ne parle pas de manière générale des chrétiens en tant que musulman, mais plus précisément en tant que membre d’une classe particulière, celle des, La façon d’identifier autrui dépend en grande partie du rapport que l’on entretient avec lui. Deux Conseils, nettement séparés, se partagent désormais la gestion communautaire, l’un religieux, l’autre civil. » et dont Frédéric Feydit explique qu’il « a servi à former la très grosse majorité des noms de famille » (1969, p. 240), on le voit littéralement s’imposer sous nos yeux à partir de 1864. Installée surtout au Caire, elle devient vite minoritaire par rapport aux immigrants venus des terres centrales de l’Empire ottoman qui affluent de 1810 à 1830. De plus, l’absence de nom de famille ne permet pas toujours de reconstituer des généalogies fiables. Le titre d’agha désigne plutôt quelqu’un d’aisé dont la fortune provient d’un métier lié à la finance ou au commerce, tandis que celui d’efendi renvoie à une profession dans l’administration, parfois dans la haute administration. Avertissez-moi par e-mail des nouveaux commentaires. Il en est ainsi de ce concessionnaire de la douane de Boulaq, que Jabartî qualifie, en 1812, de chrétien du pays de Rûm, ). C’est ce que montre par exemple l’acte de décès, en 1833, de la « fille de Fesdek et femme de, . Deux Conseils, nettement séparés, se partagent désormais la gestion communautaire, l’un religieux, l’autre civil. Ce sont les notables d’Égypte, et en particulier Yéghiazar. Ce texte, approuvé par le pouvoir ottoman, porte sur la réorganisation administrative interne des Arméniens de l’Empire et sur l’équilibre des pouvoirs à l’intérieur de la communauté, entendue ici à l’échelle de l’Empire. Et l’on constate, malgré l’absence de procédure uniforme et fixe d’identification pour les individus, malgré l’absence d’un cadre rigoureux, une forme de régularité. On peut même s’étonner de la poursuite de l’enregistrement des décès, en plein pic de l’épidémie, en avril 1835. d’après la transcription en caractères arméniens, terme dont l’origine apparaît clairement italienne mais qui fait partie du vocabulaire des dictionnaires turcs de l’époque comme celui de D. Kélékian et dont il est dit qu’il s’emploie pour désigner les hôpitaux des communautés non-musulmanes, p. 74 de la version de 1911. » et dont Frédéric Feydit explique qu’il « a servi à former la très grosse majorité des noms de famille » (1969, p. 240), on le voit littéralement s’imposer sous nos yeux à partir de 1864. La séparation des pouvoirs s’y applique de la même manière : « l’évêque diocésain est le Président avec pouvoir exécutif du conseil provincial. Mais il ne faisait pas de différences entre eux, non plus d’ailleurs que le recensement de 1846-48, premier recensement mené en Égypte. De même, les individus ne sont pas toujours désignés de la même façon. Les deux églises nationales sont non chalcédonienne, et des Arméniens ont été artisans pour les chrétiens d’Egypte au moyen-âge, comme en témoignent les indications du musée copte du Caire. Le titre d’. Même lors de leur mariage, elles ne sont généralement ni décrites ni nommées. Dans la première décennie de l’enregistrement, ce sont environ 80% des adultes qui portent un tel nom d’origine. Le mode d’identification, loin d’être neutre, permet ainsi d’entrer dans les relations complexes que les individus entretiennent entre eux. Delanoue Gilbert, 1982, Politiques et moralistes musulmans dans l’Égypte du xixe siècle (1798-1882), Le Caire, IFAO. Des liens multiples et étroits ont longtemps uni les Arméniens vivant en Égypte à Jérusalem. Le fait de s’adresser à Nubar en faisant le détour par ses liens de parenté (neveu de, fils de, frère de) avec des hommes tous au service du vice-roi, qui lui doivent donc tout, oblige Nubar en retour, bien plus efficacement que ne le ferait la menace. Arménien originaire de Smyrne, Nubar avait été pris en charge, en 1842, à l’âge de dix-sept ans, par son oncle, Boghos Youssoufian, devenu homme de confiance de Muhammad ‘Alî, à la suite de la mort de son père, Meguerditch, qui était aussi un agent du vice-roi. J’examinerai ces questions de part et d’autre de l’année 1864 qui marque, du point de vue des procédures employées, une rupture nette avec la période qui précède. Il arrive même que l’on ne connaisse pas son nom alors que l’on connaît son origine géographique, ce qui montre l’importance que les individus accordent, en période d’immigration, à l’origine géographique. Au début du 19e siècle, nombre d’entre eux effectuaient le pèlerinage à Jérusalem, découvrant à la fois la ville sainte et ses institutions arméniennes, notamment le couvent des Saints-Jacques, participant ainsi tant à la fabrique de Jérusalem qu’à celle d’une Jérusalem arménienne. ), les trois types étant alors utilisées dans l’Empire ottoman. Il est étonnant de voir mentionner qu’elles sont mortes en couches comme c’est le cas, en 1833, pour la femme du tailleur Papel, alors que ce n’était probablement pas une cause rare de mortalité. Les Arméniens d’Égypte, au tout début du, , sont dans leur grande majorité des migrants (80%) qui parlent le turc ou l’arménien, très peu l’arabe (à part les Arméniens nés en Égypte). Ter Minassian Anahit, 1982, « L’Arménie et l’éveil des nationalités (1800-1914) » in Gérard Dédéyan (dir. Au nom de Dieu tout puissant, je soussigné Grégoire d’Elie connu chez les indigènes sous le nom de Karkour Eghia et chez les Arméniens de Krikor Yeghiayan … ». ( Déconnexion / Ainsi en 1826, lors de son (deuxième) mariage, le bijoutier Meguerditch est appelé Papaz oghlou. This article focuses on this earlier stage of registration, which shows considerable variation between individual cases. Le fait de s’adresser à Nubar en faisant le détour par ses liens de parenté (neveu de, fils de, frère de) avec des hommes tous au service du vice-roi, qui lui doivent donc tout, oblige Nubar en retour, bien plus efficacement que ne le ferait la menace. Cette dernière est pendant tout le xixe siècle l’instance de validation des individus qui en dépendent. 41Le pèlerinage effectué à Jérusalem est exprimé par un titre que porte l’individu, toujours placé devant son prénom, celui de mahdési18. En effet ce qui reste de l’administration avant cette date, quelques feuillets pour l’année 1825, révèle un enregistrement très sommaire. Sur sa pierre tombale, Yéghiazar amira fait graver qu’il est « venu en cette ville par la grâce du Prince ». Yéghiazar, Si le –ian s’ajoute systématiquement à partir de 1864 à la fin du nom de baptême du père, de son métier, de son surnom ou de son origine géographique, il ne forme pas encore un nom de famille qui se transmet, car il change à chaque génération. Et ce, avant même la reconnaissance du millet catholique en 1831. Interview du Dr. Vicken Jizmejian et du Dr. Geroge Noubar Simonian. En l’absence d’un nom de famille, l’individu était identifié par la combinaison d’éléments qui s’ajoutaient à son nom : le lien avec d’autres personnes - membres de la même famille, amis, relations de travail-, certaines pratiques comme le pèlerinage à Jérusalem, le titre d’usage, donc le statut social. 7Si le –ian s’ajoute systématiquement à partir de 1864 à la fin du nom de baptême du père, de son métier, de son surnom ou de son origine géographique, il ne forme pas encore un nom de famille qui se transmet, car il change à chaque génération. Dès l'été 1914, les dirigeants jeunes-turcs demandent aux notables arméniens de Van et d'Erzurum d'organiser une révolte des Arméniens contre les Russes, formulée notamment lors du huitième congrès de la Fédération révolutionnaire arménienne (ou FRA). Ibrahim semble craindre la relation qui sera faite à son père de ce voyage, ce qui rend Nubar perplexe : « Je n’y comprenais rien, car, en vérité, j’avais beau chercher, je ne trouvais rien dans sa conduite ou dans le langage qu’il avait tenu en Europe qui fût de nature à offenser ou à indisposer son père. En 1843, le registre des Arméniens apostoliques du Caire note le décès de « Haroutioun Kurd oghlou dont le surnom (, ) est Ibrahim ». 34À partir de 1826, les individus sont donc plus souvent et mieux décrits. Pour les Arméniens nés en Égypte, adultes au moment de l’enregistrement, le scribe indique parfois la mention égyptien (yekibdatsi, bélédi ou mesertsi). Ce sont eux qui sont maintenant les hommes importants ; ils occupent de hautes positions, ils portent les vêtements qui conviennent aux grands, ils montent les plus beaux mulets et chevaux ; devant eux et derrière eux, marchent des esclaves et des serviteurs qui, le bâton à la main, chassent les gens pour leur frayer le passage. , qui sonne effectivement plus arabe. Les Arméniens catholiques, qui avant cette date dépendaient en théorie des Arméniens apostoliques –c’était le cas, sur un mode très conflictuel parfois, dans les terres centrales de l’Empire ottoman-, se sont placés en Égypte très tôt –on en a des traces dès le début du xviiie siècle- sous l’autorité des catholiques latins et plus exactement des Franciscains de la Terre Sainte qui ont en charge les catholiques orientaux. , souvent en lien avec la situation sociale de leur père ou époux. 38Il existe alors peu de noms qui pourraient s’apparenter à des noms de famille. L’inscription des baptêmes est distinguée de celle des mariages et des sépultures, quoique tous soient rassemblés dans un même registre. 24Jabartî désignait les Arméniens comme chrétiens. » (Nubar pacha, 1983 : 34-35). 30C’est la même démarche, inversée toutefois, qui conduit les Arméniens à traduire les lieux dans lesquels ils vivent, ce qui est une forme d’appropriation du nouvel espace dans lequel ces immigrants se trouvent plongés : le quartier du Vieux-Caire (miṣr al qadîma), dans lequel se trouve leur cimetière et où quelques Arméniens sont installés, est toujours traduit en turc, esgui meser, écrit en caractères arméniens, dans les registres. Jabartî désignait les Arméniens comme chrétiens. L’origine servile de la mère ainsi que l’absence de mariage entre les parents entraînent parfois pour les enfants une forme de stigmatisation qui se lit précisément dans la dénomination qui sert à les identifier. , d’un niveau de langue soutenu ainsi que d’une notation précise des actes religieux. These variations allow insights into the functioning of a local society which became less visible after 1864. 17 L’hospice communautaire est tantôt désigné en arménien, hivantanots, tantôt en turc, ispitalia ou isbitarian, d’après la transcription en caractères arméniens, terme dont l’origine apparaît clairement italienne mais qui fait partie du vocabulaire des dictionnaires turcs de l’époque comme celui de D. Kélékian et dont il est dit qu’il s’emploie pour désigner les hôpitaux des communautés non-musulmanes, p. 74 de la version de 1911. Il existait avant cette date une petite communauté arménienne en Égypte, sur laquelle on possède peu de traces. Ce suffixe –ian, qui indique « l’appartenance à une catégorie d’hommes (famille, race, religion, secte, etc.) ( Déconnexion / On connaît donc beaucoup moins de choses à leur égard. Kardachian, 1986, Notes pour l’histoire des Arméniens d’Égypte, tome 2, Venise. L’une de ces communautés est atypique, peu nombreuse et moins connue, celle des Arméniens d’Egypte. 26On ne doit donc pas s’étonner que les chrétiens perçoivent, mieux que ne le font les musulmans, les différences entre les rites. 21 Qu’on retrouve à l’identique, mais dans des langues différentes, aussi bien chez Jabartî que dans les archives des Arméniens catholiques, ou celles des Franciscains de la Terre Sainte, qui s’occupent des catholiques orientaux. Dans le texte, ces éminents personnages disent qu'ils sont la 3ème génération des Arméniens d'Egypte. À partir de 1864, l’administration communautaire élabore pour les individus qui en dépendent, un état civil moderne, à l’aide de moyens efficaces : enregistrement uniforme, nombre restreint de rubriques, imposition d’un nom de famille. De plus, l’absence de nom de famille ne permet pas toujours de reconstituer des généalogies fiables. On l’apprend toujours un peu par hasard : en effet, il faut que ce soit inscrit pour que l’on en prenne connaissance. Et on ne sait pourquoi le père n’est jamais nommé : est-il mort ? Quels éléments choisir dans la vie d’un individu pour le rendre unique, impossible à confondre avec un autre ? Que leur identité arménienne est très importante tout en étant à 100% égyptien. C’est le cas pour les Arméniens qui vivent à Boulaq et dans le quartier du Vieux-Caire, deux quartiers excentrés par rapport au « quartier » arménien mais à forte activité commerciale, Boulaq étant le port du Caire lié aux activités avec Rosette puis Alexandrie par la suite, tandis que celui du Vieux-Caire l’est à celles avec la Haute-Égypte. Elles révèlent un souci, dès le début du XIXe, d’un niveau de langue soutenu ainsi que d’une notation précise des actes religieux. J’examinerai ces questions de part et d’autre de l’année 1864 qui marque, du point de vue des procédures employées, une rupture nette avec la période qui précède. En effet ce qui reste de l’administration avant cette date, quelques feuillets pour l’année 1825, révèle un enregistrement très sommaire. Depuis le début du siècle, des luttes de pouvoir internes3 remettent en cause, dans la capitale de l’empire, la mainmise du clergé soutenu par les amira4 sur la gestion des affaires communautaires. Le registre de décès signale ainsi, en 1846, que « quelqu’un qui est un immigrant originaire d’Arapkir est mort à l’hospice » (isbitarian arapkertsi kharib vomen hankiav) et qu’un immigrant originaire de Malatia est mort dans la maison du tailleur Garo (malatiatsi kharib(n) terzi Garo-in doun mérav). ». L’enjeu, financier en particulier, est de taille puisque de fortes sommes d’argent doivent échoir à des institutions ou des personnes arméniennes situées dans plusieurs villes de l’empire ottoman. L’adoption, en 1864, de méthodes administratives efficaces, tant dans la forme que dans le fond, contraste tellement avec celle qui prévalait auparavant que je m’attarderai davantage sur l’identification avant cette date pour connaître, en l’absence de cadre formel contraignant — ce qui ne signifie pas pour autant absence de règles, — quels furent les choix opérés pour identifier les individus et ce qu’ils nous révèlent. On trouve quelques occurrences, rares cependant, du terme hadji19. Ils habitent des maisons élevées et somptueuses qu’ils achètent très cher. 42D’autres éléments personnels peuvent être notés, comme les surnoms, en turc (topal, boîteux), en arménien (zevzeg, frivole, gardj, court, de petite taille) et parfois en arabe (abiat Youssef) nés d’une caractéristique physique ou d’un trait de caractère ou encore des mentions qui concernent la vieillesse (barav, réservé aux femmes, dzérouni), le jeune âge (yéridasart hasagui). Malgré les efforts des scribes qui multiplient les éléments d’identification, il n’est pas toujours possible non plus d’attribuer tel acte à telle personne précise, notamment dans les cas d’homonymie. C’est la même démarche, inversée toutefois, qui conduit les Arméniens à traduire les lieux dans lesquels ils vivent, ce qui est une forme d’appropriation du nouvel espace dans lequel ces immigrants se trouvent plongés : le quartier du Vieux-Caire (, Les Arméniens catholiques conservent également leurs archives au Caire, au Patriarcat arménien cath, Ce sont les archives des Arméniens apostoliques qui sont principalement examinées ici. Son nom, Garabed, malgré la déformation –Karâbît- subie lors de sa transcription en arabe sous la plume de Jabartî, le désigne vraisemblablement comme Arménien (Jabartî, 1997, p. 996). Les Arméniens présents en Egypte au début du xixe siècle sont majoritairement des immigrants récents. Il n’est pas indifférent que Jabartî déplore à plusieurs reprises l’abandon par les chrétiens d’un vêtement distinctif, autre élément d’identification en voie de disparition à l’époque, malgré quelques tentatives de rétablissement qu’il salue, en 1818, sans vraiment y croire : « Que ces mesures seraient bonnes si elles pouvaient durer » (Jabartî, 1997, 1382). La procédure d’identification peut également opérer des raccourcis dans la filiation, comme dans l’énoncé suivant « le petit-fils de Ebirchoumdji Hovhannès est mort le 17 août 1833 ». 11Il paraît donc probable que l’administration centrale de Constantinople ait fourni le modèle des nouveaux registres utilisés dès juillet 1864 chez les Arméniens (apostoliques) d’Égypte. de ‘Ali pacha Mubarak signalent qu’elle donne dans le quartier de Ḥârat Zuwayla où vit la majeure partie des Arméniens (Mubârak, 1982 : 72). 12Tous les individus, hommes, femmes et enfants, sont donc saisis de manière homogène. Ainsi les Arméniens catholiques contractent-ils des alliances avec des maronites (littéralement « de nation maronite », azkav maroni), des grecques catholiques (hoyn katolik), les Arméniens apostoliques épousent des coptes (khepti ou i khepti azké), des grecques orthodoxes, des syriaques. 35L’inscription des baptêmes est distinguée de celle des mariages et des sépultures, quoique tous soient rassemblés dans un même registre. Leurs façons de se désigner révèlent les antagonismes. Il a également écrit sur l’Arménie dans son roman intitulé « Erevan ». Jabartî, 1997. Les liens de parenté sont toujours notés, en arménien, avec une grande précision, et rapportés à un chef de famille ou de maisonnée dont on est alors frère, sœur, père, mère, beau-frère, belle-sœur, bru, gendre, nièce, etc. Ce qui pose la question de leur « neutralité » religieuse ou communautaire, déjà évoquée plus haut. Il est vrai que les hommes adultes exercent quasiment tous une profession. Concernant la localisation, certains éléments plus précis encore sont fournis comme l’hébergement à l’hospice communautaire, on l’a vu plus haut, ou la résidence, pour les individus célibataires plutôt, dans une wakâla. », - « C’est vrai, mais tu ne connais pas encore le vieux lorsqu’il se fâche et qu’il grince des dents. 43Pour ceux qui n’habitent pas le quartier proche de l’église arménienne, situé au nord du quartier juif, à proximité du quartier franc, la mention du quartier est indiquée. En effet, non seulement leur existence répond aux objectifs clairement énoncés dans la Constitution, mais aussi ils contrastent fortement avec l’enregistrement qui existait auparavant. L’adoption, en 1864, de méthodes administratives efficaces, tant dans la forme que dans le fond, contraste tellement avec celle qui prévalait auparavant que je m’attarderai davantage sur l’identification avant cette date pour connaître, en l’absence de cadre formel contraignant — ce qui ne signifie pas pour autant absence de règles, — quels furent les choix opérés pour identifier les individus et ce qu’ils nous révèlent. Comme le fait remarquer Gilbert Delanoue, « un des principaux griefs qu’il formule à l’encontre de Muhammad ‘Alî est de favoriser l’ascension sociale des chrétiens. Suite aux massacres d’Adana en 1909 où près de 20 000 Arméniens sont tués en un mois, nombre d’entre eux quittent la région sous domination turque pour d’autres, le Liban, la Syrie et l’Egypte notamment (ottomans mais peuplés majoritairement d’Arabes). Ils se font baptiser, se marient à l’église latine et sont enterrés au cimetière latin12. Les remarques mentionnant explicitement les Arméniens apparaissent entre 1812 et 1821, date finale de la chronique. Changer ), Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Certes, ils se fréquentent dans le monde du travail, notamment auprès de Muhammad ‘Alî, nouent des liens d’amitié, mais ne s’épousent quasiment jamais, comme on le constate dans les registres de mariage des deux communautés jusqu’au début du xxe siècle. Toutefois, dès le début du xixe siècle les Arméniens ne forment pas une seule communauté mais deux, apostolique et catholique. La procédure d’identification peut également opérer des raccourcis dans la filiation, comme dans l’énoncé suivant « le petit-fils de Ebirchoumdji Hovhannès est mort le 17 août 1833 ». Une triple transformation s’opère alors. La mention des infirmités, de la maladie -on trouve des aveugles (. Il en est ainsi de ce concessionnaire de la douane de Boulaq, que Jabartî qualifie, en 1812, de chrétien du pays de Rûm10 (naṣrânî rûmî). Leurs façons de se désigner révèlent les antagonismes. C’est ce que révèle l’anecdote suivante racontée par Nubar, et qui le met en scène alors qu’il était tout jeune puisqu’il n’avait que 21 ans. A digital resources portal for the humanities and social sciences, Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, Appartenances communautaires et identités collectives, Licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International.